En Corée du Nord, des copies de grandes enseignes occidentales servent surtout de vitrine de propagande, réservée à l’élite et aux touristes étrangers.
Par @radiosiskofm
Des vidéos partagées récemment par des touristes et relayées par plusieurs médias occidentaux montrent des enseignes nord-coréennes étrangement familières, un magasin affichant le logo d’Ikea et un café ressemblant à Starbucks. Ces lieux, situés dans des centres commerciaux huppés de la capitale, alimentent les spéculations sur la stratégie de communication du régime de Kim Jong-un, qui cherche à projeter une image de modernité à l’international.
Selon The Sun, un faux magasin Ikea a été repéré dans un centre commercial de Pyongyang, avec un logo parfaitement identique à celui de l’enseigne suédoise. Mais contrairement aux véritables magasins du groupe, pas de parcours labyrinthique ni de clients en foule, les vidéos montrent des meubles alignés de façon sommaire, dans un décor vide et aseptisé. Interrogé, Ikea a confirmé ne disposer d’aucune boutique autorisée en Corée du Nord et surveiller activement les violations de marque.
De son côté, un café imitant l’univers de Starbucks Reserve a été identifié dans un centre commercial appelé Rangrang Patriotic Geumganggwan. Les premières images ont circulé sur des réseaux sociaux chinois comme Xiaohongshu et Weibo avant d’être reprises par la presse sud-coréenne. Là encore, tout semble pensé pour évoquer le chic occidental, décoration épurée, boissons présentées comme du « café premium », et une signalétique visuellement proche de la marque américaine. Starbucks n’a évidemment aucune activité officielle en Corée du Nord.
Ces lieux ne sont pas accessibles à la population nord-coréenne dans son ensemble. Des témoignages publiés sur Reddit et d’autres plateformes indiquent qu’ils relèvent de ce que l’on appelle des « Privileged Stores », des magasins réservés à l’élite politique, aux diplomates et aux touristes étrangers triés sur le volet. Plusieurs internautes estiment qu’une partie des produits exposés seraient même vides ou factices, destinés uniquement à donner l’illusion d’abondance.
Pour les spécialistes, ces copies d’enseignes mondiales ne relèvent pas d’une stratégie commerciale mais bien d’un exercice de communication. L’objectif, montrer aux rares visiteurs internationaux que la Corée du Nord « suit » les standards mondiaux, alors même que les sanctions économiques la coupent de l’économie globale. Comme l’explique un analyste cité par News1 Korea, « ces magasins sont des décors destinés à rassurer, à impressionner et à occulter la réalité quotidienne des Nord-Coréens ».
La Corée du Nord n’en est pas à son premier détournement de marques. Dans le passé, des images avaient déjà montré des copies de McDonald’s ou de KFC, ainsi que des contrefaçons de produits occidentaux vendus à Pyongyang. La différence aujourd’hui réside dans l’exposition numérique, grâce aux réseaux sociaux, les rares touristes autorisés à filmer deviennent malgré eux les vecteurs d’une communication paradoxale, oscillant entre fascination et satire.
Ces faux Ikea et Starbucks de Pyongyang ne sont pas de véritables magasins mais des vitrines soigneusement scénarisées, destinées à projeter une illusion de modernité auprès d’un public restreint. Si elles témoignent du désir du régime de s’inscrire visuellement dans la mondialisation, elles rappellent aussi combien cette ouverture reste sous contrôle et profondément sélective.
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