Deux jeunes manifestants ont été tués lors de la 5ᵉ journée de mobilisation au Maroc. Porté par le collectif GenZ 212, le mouvement réclame santé, éducation et lutte contre la corruption, face à un pouvoir accusé de répression violente.
Par @sahbymehalla
Un garçon est interpellé lors de manifestations menées par des jeunes réclamant des réformes de la santé et de l’éducation, qui ont tourné à la violence, à Salé, au Maroc, mercredi 1er octobre 2025. (Photo AP/Mosa'ab Elshamy)
Pour la cinquième journée consécutive, les rues marocaines ont été le théâtre de manifestations d’une ampleur inédite. Le mouvement, porté par la Génération Z, a connu un tournant tragique avec la mort de deux jeunes manifestants, tués lors d’affrontements avec les gendarmes dans la petite ville de Leqliaa, près d’Agadir. Les autorités évoquent une riposte en « légitime défense » après une attaque contre un poste de gendarmerie. Mais pour de nombreux jeunes, cette violence illustre au contraire la fracture croissante entre l’État et une jeunesse en quête d’avenir.
Depuis plusieurs jours, des milliers de jeunes, souvent mobilisés via le collectif GenZ 212, descendent dans les rues de Casablanca, Marrakech, Tanger, Oujda et d’autres villes du royaume. Leurs revendications sont claires, un accès digne à l’éducation, à la santé publique et une lutte réelle contre la corruption.
« Ce n’est pas seulement une colère passagère, c’est une génération qui réclame sa place », observe un analyste cité par Reuters.
Le malaise s’est cristallisé autour de scandales récents, notamment les décès de femmes après des césariennes à l’hôpital Hassan II d’Agadir, devenus le symbole des failles du système de santé marocain. Le Monde parle d’un pays à « deux vitesses », où des services publics fragiles contrastent avec les dépenses massives engagées pour la Coupe du monde 2030 que le Maroc co-organisera.
La spécificité de ce mouvement tient à sa base, une jeunesse ultra-connectée, qui organise ses actions sur TikTok, Instagram ou Discord. Sous le nom de GenZ 212, le mouvement se passe de leaders identifiés, ce qui le rend à la fois plus difficile à réprimer et plus imprévisible.
Selon France 24, cette génération s’indigne aussi du manque de perspectives économiques et du chômage élevé, dans un pays où près d’un quart des jeunes diplômés ne trouvent pas d’emploi stable.
Cette spontanéité et cette horizontalité rappellent d’autres mouvements récents dans la région, les jeunes se filment, diffusent en direct, documentent chaque arrestation et chaque dérapage policier, ce qui entretient la dynamique et amplifie la colère.
Les autorités affirment que les gendarmes ont dû ouvrir le feu pour se protéger face à un groupe qui tentait de prendre d’assaut une brigade et de voler des armes. Les témoins et militants parlent, eux, d’un usage disproportionné de la force.
Selon AP News, les deux victimes ont été tuées dans la nuit du 1ᵉʳ octobre, alors que les manifestations entraient dans leur cinquième jour.
La colère ne faiblit pas pour autant. Au contraire, la répression alimente le sentiment d’injustice et incite davantage de jeunes à rejoindre le mouvement. « Le peuple veut en finir avec la corruption », titrait RFI, résumant le slogan le plus répété dans les cortèges.
Le Maroc fait face à une équation périlleuse. Le pouvoir craint une escalade incontrôlable, mais une répression accrue pourrait amplifier la défiance de la jeunesse. À l’inverse, ignorer les revendications pourrait installer un climat de crise durable.
Pour la Génération Z, ce mouvement est déjà fondateur, il marque leur entrée en politique et leur volonté d’exiger un avenir à la hauteur de leurs attentes. Comme le souligne Euronews, « cette mobilisation illustre une fracture générationnelle et territoriale profonde ».
Les manifestations de la Génération Z au Maroc montrent que la contestation sociale ne faiblit pas. Les morts de Leqliaa risquent d’accélérer la mobilisation. Le pays devra répondre à ces appels au changement, au risque de voir la fracture entre la jeunesse et l’État s’élargir.
ÉCRIT PAR : SAHBY MEHALLA
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