Le film de Kaouther Ben Hania, ovationné près de 24 minutes, décroche le Grand Prix du Jury à la Mostra et s’envole déjà vers les Oscars 2026.
Par @sahbymehalla
De gauche à droite, les producteurs exécutifs Joaquin Phoenix et Rooney Mara, la réalisatrice tunisienne Kaouther Ben Hania, l’acteur Motaz Malhees et l’actrice Clara Khoury posent avec un portrait de Hind Rajab à Venise mercredi. (Tiziana Fabi/AFP/Getty Images)
Un film qui transcende l’art pour devenir un témoignage historique
Venise a vibré cette semaine au rythme d’une émotion brute et universelle. The Voice of Hind Rajab, le nouveau film de la réalisatrice tunisienne Kaouther Ben Hania, a bouleversé la 82ᵉ Mostra. Présenté en compétition officielle, le long-métrage a reçu une ovation de près de 24 minutes lors de sa première mondiale le 3 septembre 2025 — un record qui restera gravé dans l’histoire du festival.
Le film s’appuie sur une réalité tragique, l’appel téléphonique d’une fillette palestinienne de 6 ans, Hind Rajab, coincée dans une voiture criblée de balles à Gaza en février 2024. Sa voix suppliante, captée par les équipes du Croissant-Rouge palestinien, constitue le cœur battant du récit. Kaouther Ben Hania, déjà remarquée pour L’Homme qui a vendu sa peau et Les Filles d’Olfa, tisse un dispositif cinématographique où le réel et l’art s’entrelacent, donnant à entendre ce que l’on préfère souvent taire.
Cette image diffusée par Mime Films/Tanit Films montre Motaz Malhees dans une scène de The Voice of Hind Rajab. (Mime Films/Tanit Films via AP)
Le 6 septembre, le verdict est tombé, The Voice of Hind Rajab s’est vu décerner le Lion d’argent – Grand Prix du Jury, la deuxième récompense la plus prestigieuse du festival. Si le Lion d’or a finalement été attribué à Father Mother Sister Brother de Jim Jarmusch, la consécration de Kaouther Ben Hania a été saluée comme un moment fort de la Mostra.
Certains critiques, notamment dans The Guardian, estiment que le jury a opté pour un compromis politique en évitant de donner le Lion d’or à un film perçu comme trop sensible dans le contexte géopolitique actuel. Mais la portée universelle de l’œuvre ne fait aucun doute, c’est un cri, une mémoire gravée sur pellicule.
De Venise à Hollywood ?
Au-delà du palmarès, The Voice of Hind Rajab est déjà lancé dans une trajectoire mondiale. Le film a été sélectionné pour représenter la Tunisie aux Oscars 2026 dans la catégorie « Meilleur film international ».
Avec ses multiples prix collatéraux (UNESCO, Arca CinemaGiovani, Croissant-Rouge italien), le long-métrage dépasse déjà le cadre d’un festival pour s’inscrire dans une dynamique mémorielle. La voix fragile de Hind Rajab résonne désormais comme une pièce essentielle du patrimoine cinématographique contemporain.
Un cinéma qui réveille les consciences
Kaouther Ben Hania signe ici une œuvre qui illustre la puissance du cinéma engagé, faire naître l’empathie, imposer le silence dans une salle comble, et rappeler que derrière les chiffres des conflits, il y a toujours des noms, des visages, des voix.
En élevant le drame de Hind Rajab à la dimension universelle de l’art, The Voice of Hind Rajab ne se contente pas d’émouvoir, il oblige à regarder en face ce que la politique et l’actualité voudraient effacer.
Ovation record, Grand Prix du Jury, sélection aux Oscars. Le film de Kaouther Ben Hania transforme la voix d’une enfant martyre en une mémoire collective, et confirme que Venise 2025 restera l’édition où le cinéma s’est fait conscience.
ÉCRIT PAR : SAHBY MEHALLA
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